5 octobre 2019 Editoriaux hebdomadaires2 Minutes

Il y a sans doute erreur à croire qu’une œuvre d’art est là pour représenter. L’œuvre d’art ne représente pas, elle agit. Pour elle, être à l’œuvre ne signifie rien d’autre que de simplement être elle-même. L’artiste se met au service de cette « mise en œuvre ». Il interroge la matière, écoute ce qui est à l’origine, entrevoit ce qui demande à demeurer dans l’obscurité ou à venir à la lumière. Evi Keller remplit pleinement ce service. Elle est une artiste.
Bienvenue à vous qui entrez dans l’église de Saint-Eustache pour cette Nuit Blanche 2019. Nous sommes heureux de vous accueillir dans ce lieu de beauté et de paix.

Yves Trocheris, prêtre de l’Oratoire, curé de Saint-Eustache.

Au cours d’un rituel initiatique, Evi Keller invite le public à vivre une expérience fondatrice. Véritable œuvre-monde, dont les composantes se dévoilent peu à peu, la Performance/Matière/Lumière nous confronte à l’origine de la création, prise en son sens le plus radical ; quand tout n’était encore que fusions, écoulements, concrétions de matières, fulgurances lumineuses. Plus qu’une simple installation, ici les « éclairs sillonnent les ténèbres de la nuit des temps », pour reprendre une formule de Schelling. L’art d’Evi Keller renoue magiquement avec les forces naturelles, la romantisation du monde, chère à Novalis, union du connu et de l’inconnu, du fini et de l’infini, du visible et de l’invisible : « C’est ainsi qu’on retrouvera le sens originaire. »

Olivier Schefer, écrivain et philosophe, spécialiste du romantisme allemand et de l’œuvre théorique de Novalis.