Chaque fois que je vais à Saint-Eustache en bus, ou que j’en reviens, j’emprunte la rue Gay-Lussac et je passe devant une boutique dont voici l’enseigne : « Le ciel est à tout le monde ». Bien que cette boutique propose des articles pour enfants en bas-âge – je me suis renseigné en ligne –, ce n’est pas ce qui m’a attiré, évidemment, mais bien l’en-tête de la boutique. Pensez donc, le ciel, ça nous intéresse, nous, les chrétiens !

Et puis autre chose m’a séduit, c’est qu’à son origine, cette boutique vendait des cerfs-volants – Je me suis encore renseigné. Vous ne voyez pas où je veux en venir ? Les cerfs, ça nous parle aussi, nous les paroissiens de Saint-Eustache ! Ou plutôt, le Cerf ! Bien que le nôtre ne soit pas volant, et qu’il ait les pieds bien sur terre, il nous offre un signe venant du ciel : la Croix qui complète les bois ornant sa tête, vision apparue à Eustache lors d’une partie de chasse, et qui provoqua sa conversion ainsi que celle de sa famille.

Si tous les cerfs – nombreux – qui ornent les luminaires de notre église étaient des cerfs… volant, notre église s’élèverait peu à peu et surplomberait le Forum, comme une montgolfière. Tous les paroissiens s’étant regroupés dans la nacelle qui s’y trouverait accrochée, contempleraient un spectacle bien plus impressionnant que celui que l’on découvre depuis la lanterne qui pointe au-dessus de notre église. Et pour le public resté à terre, ce serait une attraction sans pareille, fascinante, à retentissement mondial, digne d’un vaisseau spatial des rencontres du troisième type. Battus Hollywood et la Nasa ! Et la notoriété de la montgolfière des Tuileries – qui fera son retour cet été – serait largement supplantée, pensez-donc : une église qui vole, surtout une église de cette taille !

Mais non, mais non, mais non ! la vocation du chrétien n’est pas de s’envoler dans les airs et faire de l’épate. Si le Verbe s’est incarné, c’est bien pour que nous en fassions autant et vivions à fond notre vocation de chrétien au cœur du monde. Nous avons une avance sur Lui, nous sommes déjà des humains, et ne venant pas du ciel, nous n’avons pas besoin de nous incarner. Bien que nous ayons parfois des tentations de nous échapper de notre humanité, loin de notre monde, nous rêvons d’un au-delà mirifique, près du Seigneur, en oubliant, qu’en fait, il est avec nous, il nous a assuré qu’il serait avec nous jusqu’à la fin du monde. C’est pas du blabla, c’est Parole d’Évangile, c’est Parole de Dieu ! Le ciel est à tout le monde, et tout le monde est pour le ciel. Mais en attendant…

Jean-Marie Martin, prêtre oratorien